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Thursday, February 15, 2007

Les ordonnances sur mesure du rockeur Rachid Taha

Musique du monde . Diwan 2, le nouvel album du chanteur originaire d’Algérie, rend hommage aux grandes chansons arabes. Rencontre avec un artiste non conformiste.

Diwan 2,
de Rachid Taha,
Universal-Barclay.

Rachid Taha possède ce qui fait souvent défaut aux productions musicales d’aujourd’hui : le non-conformisme. À l’origine d’un parcours hors des sentiers battus, il aime effectuer des « allers et recours » entre - tradition et modernité. Un - répertoire métissé où le rock et le chââbi reflètent le pays d’accueil et la douleur de l’exil. Un mariage de sonorités occidentales et orientales qui vaut à l’ancien leader de Carte de séjour, l’admiration d’artistes prestigieux, tels Brian Eno ou encore Patti Smith, séduits par sa démarche d’ouverture aux autres cultures.
Diwan, paru il y a huit ans, avait permis au chanteur - originaire d’Algérie de laisser libre cours aux souvenirs de son pays d’enfance. Diwan 2 -poursuit la quête d’un blues rock arabe où se croisent aussi bien les cordes de l’Orchestre du Caire que la mandole du - virtuose Hakim - Hamadouche. Un album qui rend hommage aux grandes voix orientales où se mêlent des reprises de - Dahmane el Harrachi, Oum Kalsoum ou Abdel Halim Hafez... le tout réalisé avec la complicité du musicien - anglais Steve Hilllage. -
D’Écoute-moi camarade - évoquant la mémoire immigrée à Agatha du Camerounais Francis Bebey, en passant par les compositions de Taha (Joséphine, Ah mon amour), l’album ravira tous ceux pour qui la musique doit avant tout se jouer des frontières.


Diwan 2 ne va-t-il pas au-delà du simple hommage à la chanson arabe ?
Rachid Taha. C’est un peu mon abécédaire. Comme une petite encyclopédie musicale sur les chanteurs, les chansons, la musique. C’est un - petit cours d’histoire. La jeunesse de la troisième génération n’a eu que très rarement l’occasion de s’intéresser à cette histoire singulière de la musique. Mais cela vaut pour le public français : c’est aussi à lui que je m’adresse. Pour connaître les autres, il faut connaître sa culture. Moi, je passe par la musique. Mais si je pouvais faire un Diwan français, ça serait bien aussi ! Si les gens se réfugient chez les charlatans, c’est parce qu’ils sont perdus, qu’ils ne connaissent pas les choses. C’est pour ça que c’est important de leur faire redécouvrir leur culture. C’est enrichissant pour avancer.

Selon vous, si la société va mal, c’est aussi parce qu’elle n’a plus de repères et ne sait plus d’où elle vient ?
Rachid Taha. Quand on est dans l’ignorance, on est bête, on est méchant, on - devient raciste. Plus on a des connaissances, plus on avance. On peut se parler, échanger des idées. Si j’ai la chance de travailler avec des gens comme Brian Eno, Robert Plant et d’autres, c’est parce qu’il y a une curiosité réciproque. Pour ma part, c’est aussi un acte politique.

Comment expliquez-vous que vous ayez finalement plus de succès en Angleterre qu’en France ?
Rachid Taha. Peut-être les Anglais sont-ils un peu plus ouverts, musicalement plus en avance. Ici, ça bouge, surtout quand on s’aperçoit que des musiciens prestigieux s’intéressent à mon travail. Là, les gens se disent que « peut-être qu’il fait des choses intéressantes ». En Grande-Bretagne, cela fait belle lurette qu’on a rapproché mon travail artistique de l’univers de Brian Eno ou de celui de Plant. Peut-être qu’en France, pour faire ce genre de musique, mieux vaut porter un nom anglo-saxon que s’appeler Rachid Taha. C’est à se demander parfois !

Comment définiriez-vous votre musique ?
Rachid Taha. Le drame des étiquettes, c’est qu’elles sont toujours sur le dos. Je pratique une musique - ouverte qui va du raï au rock, de la techno à la musique industrielle. Pour moi la musique, c’est un tout. C’est l’air que je respire et qui vient de tous les coins de la planète.

Une manière de s’ouvrir sur le monde...
Rachid Taha. Ça ne me fait pas peur. Je suis un artiste contemporain dans le sens où je vis mon époque.

Ce qui ne vous empêche pas de puiser dans la - tradition ?
Rachid Taha. J’ai besoin de retourner à la source pour aller vers la musique - moderne. La chose qui rassemble, c’est la douleur ou le bonheur. On fait de la musique parce qu’on va mal ou que l’on ne va pas bien. On compose pour se soigner. La musique est un médicament et j’essaie de faire des ordonnances.

Parlez-nous d’Écoute-moi camarade...
Rachid Taha. C’est un petit bijou. Je l’ai trouvée dans un carton de disques que j’avais acheté à Marseille. Cette chanson parle de la France, de quelqu’un qui y croyait et pour qui, finalement, ce n’est pas tout a fait ça. Pour certains, cette France terre d’accueil a été une grosse déception. Peut-être le personnage de la chanson s’est-il senti trahi dans son amour. Il l’aimait tellement fort que peut-être avant de la tromper, il en a eu marre. Elle lui a promis de le soigner, le bonheur et l’argent. Finalement, il vit dans une minuscule chambre d’un foyer Sonacotra pendant des années alors il pense qu’il aurait préféré être malheureux dans son pays que pas heureux en France. C’est un constat d’échec.

Que vous évoque l’échéance de l’élection présidentielle ?
Rachid Taha. Au lieu de culpabiliser sans arrêt les mêmes, j’aimerais une politique de tolérance, d’égalité et de fraternité. Chose qui ne se fait pas. À chaque problème, le coupable, c’est toujours l’autre. J’ai envie de dire aux hommes politiques : « Ça suffit, basta ! » Ils savent tous que les immigrés ont participé à l’économie de la France. Ça devrait être en gros titre dans les journaux : « L’immigration une chance pour la France. » On sait très bien qu’on a besoin des immigrés. Ce que je n’aime pas, ce sont les mensonges des politiques, leurs tricheries pour avoir le pouvoir et continuer à leurrer les gens ou leur faire peur.

L’idée de voir la gauche revenir ?
Rachid Taha. Quelle gauche ? Parce qu’il y a une gauche à l’heure actuelle en France ? Ségolène Royal ? Mais où va-t-on ? On est en train de payer le manque de courage de la gauche au pouvoir sur la question des - immigrés. Quelque part, la gauche est en partie responsable de ce qui se passe, La génération des vingt-vingt-cinq ans paie cette carence, cet oubli. Pourtant, ce n’est pas faute de ne pas avoir prévenu les politiques. Attention de ne pas mettre cette génération hors la loi. On ne leur donne pas de travail parce qu’ils ont des noms d’origine maghrébine ; on ne les laisse pas entrer en boîte ; on ne leur donne pas de logement... Pour moi, ce n’est pas ça la France. J’ai envie de dire à la gauche : « Faites quelque chose. »


Entretien réalisé par Victor Hache
Article paru dans le "Web de l'Humanité" le 05 janvier 2007

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